Cuir et textile intéressent aussi l’Art nouveau

Le musée de l’École de Nancy conserve des objets en cuir, plus particulièrement des reliures, ainsi que des pièces textiles. Les artistes de l’École de Nancy ont su rénover, tant dans les techniques que les décors, ces domaines traditionnels de la création artistique.

Au tout jeune Salon de la Société Nationale des Beaux-Arts de Paris en 1893, la reliure nancéienne fait une entrée fracassante. Les créations de Victor Prouvé, Camille Martin et René Wiener sont loin de laisser la critique indifférente. Les avis sont partagés : les uns louant ces œuvres modernes, les autres les fustigeant. En effet, les techniques utilisées – mosaïque de cuir et pyrogravure notamment – et les principes de composition de l’ouvrage – développement d’une image sur les deux plats – rompent radicalement avec la tradition. Ces reliures « affiches » révolutionnent cet art séculaire. Le musée conserve et expose quelques-uns de ces spécimens : la reliure pour Salammbô de Flaubert, œuvre la plus aboutie dans cette recherche radicale de modernité, les deux volumes pour L’Art Japonais de Louis Gonse ou encore le portefeuille pour L’Estampe originale.

Technique ancienne, pratiquée en Lorraine depuis le XVIIIe siècle, la broderie connaît un réel renouvellement autour de 1900, sous l’impulsion de l’École de Nancy et de Victor Prouvé en particulier. Fils d’une fine lingère et d’un dessinateur en broderie, ce dernier est très tôt sensibilisé au textile qu’il consacre comme une discipline à part entière. Ainsi propose-t-il, en collaboration avec Fernand Courteix, une véritable œuvre d’art totale avec sa robe Bord de rivière au printemps. Succédant à Émile Gallé en 1904 à la présidence de l’École de Nancy - jusqu’à la dissolution de l’association en 1914 – il inaugure vers 1905-1906, en partenariat avec plusieurs entreprises locales, une série de concours, dont certains dans le domaine du textile. Ils ont pour but d’encourager les rapports entre les jeunes décorateurs et les industriels lorrains en proposant à ces derniers de produire des types nouveaux. Albert Horel remporte ainsi le 1er prix avec son napperon La vigne et le blé qui sera édité par la Maison Heymann  à Nancy.

Le velours, dont les qualités propres sont très appréciées des artistes nancéiens, sert dans la décoration intérieure (tentures murales, tapis…) mais aussi pour l’ameublement (paravents, sièges…).  La fabrique de tissus d’art de Charles Fridrich est alors la plus importante. Il offre à sa clientèle une gamme étendue de textiles qui peuvent être agrémentés de broderie, d’applications (Tenture aux ombelles) ou de décors au pochoir. Le décor de ses tentures décolorées puise dans le répertoire végétal de l’École de Nancy (Tenture à décor de paysage avec clair de lune) et peuvent être le fruit de collaborations avec des artistes nancéiens comme Victor Prouvé, Henri Bergé ou Louis Hestaux (Tenture à décor de chardons).

Œuvres fragiles, les cuirs et les textiles nécessitent des conditions de présentation particulières. Peu d'entre elles sont donc visibles dans les collections permanentes du musée. Elles sont régulièrement présentées dans le cadre d'expositions temporaires.